Zhang Jun “Rêve lointain d’un étang en automne… Chaque année l’esprit y vagabonde”
- Du 02/11/2011 au 30/11/2011
- Localisation : ArtLIGRE
Chaque saison des pluies me rappelle les brumes des rives du Yangtze – ces brumes épaisses que je traverse au cours de mes rêves, ivre d’éther et de vapeur mélés, qui entretiennent chez moi ce goût d’absolu, et développent en moi toute une fantasmagorie.
Je vis dans ce pays depuis de nombreuses années. J’ai conservé l’habitude d’ajouter des graines de lotus au potage que je bois, tôt le matin. C’est avec nostalgie que je savoure ce plat millénaire. Depuis toujours le lotus nourrit l’âme et le corps des descendants du Dragon. Il est un élément essentiel dans les arts et la philosophie de l’Empire du Milieu. Les premiers Chinois aimaient cette fleur éternelle, qui naît dans la fange, puis se redresse avec élégance, croît telle une déesse. Dans le Soutra bouddhique Vimalakirti, le lotus symbolise la grâce naissant toujours dans la boue. Il est Le trône du Bouddha. C’est au lotus sortant de l’eau sale dans toute sa pureté que l’on compare l’homme moral et intègre, la belle âme. Zhou Dunyi, érudit de la dynastie des Song, écrivait dans un texte très apprécié des lettrés: “C’est immaculé que le lotus sort de la boue, sa beauté pure traversant l’eau claire”. Bientôt l’hiver arrive, un air froid couvre l’étang; les lotus courbent la tête, leurs feuilles mortes recroquevillées, et sont ballottés par le vent. Naguère pulpeuses et vertes comme le jade, les grandes feuilles désormais flétries ne retiennent plus les perles d’eau. Autrefois altière, la plante a perdu sa belle allure. Les fleurs de lotus, dispersées ç et l , se meurent lentement. Je suis pénétrée de cette tristesse qui recouvre l’étang. Je salue respectueusement le lotus la tige sèche et aux feuilles flétries ! Bientôt, l’endroit même où repose ce corps inerte, une nouvelle plante nait de la boue, dans une splendeur sans cesse renouvelée.