Un Monde Parfait - Sculptures monumentales

Un Monde Parfait – Sculptures monumentales

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A partir du 25 juin 2014, découvrez ou redécouvez un patrimoine moderne francilien travers l’installation évolutive “Un Monde Parfait” réalisée par les artistes Martine Feipel & Jean Bechameil. A l’heure où la modernité est réinterrogée lors de la 14e biennale internationale d’architecture de Venise, cette installation interprète trois monuments habités du XXe siècle pour permettre chacun de mieux les connaître et les appréhender.

L’installation se constitue de sculptures monumentales inspirées des 4 tours “nuages” du quartier Pablo Picasso construites par l’architecte Emile Aillaud, de la barre de la Cité des 4000 la Courneuve conçue par Clément Tambuté et Henri Delacroix et enfin des Orgues de Flandres, œuvre de Martin Schultz Van Treeck dans le 19e arrondissement de Paris. Inédite, cette dernière sculpture vient, l’occasion de l’exposition au Pavillon de l’Arsenal, enrichir le projet « Un monde parfait ». Elle a été réalisée grâce un appel financement participatif sur la plate-forme kisskissbankbank.com et a fédéré plus de 80 internautes ont ainsi contribué sa réalisation. Autour de ces “sculptures maquettes” hors normes (plus de 3m50 de haut, 4m de long), le Pavillon de l’Arsenal propose tout l’été des activités de médiation, des ateliers pédagogiques et des visites guidées afin de partager avec le plus grand nombre ces architectures emblématiques. . « C’est la monumentalité et l’idée de progrès de cette architecture, unique en son genre et partiellement en voie de disparition, qui nous intéresse et sur laquelle nous souhaitons continuer travailler en tant qu’artistes plasticiens ».

Présentation d’un Monde parfait par Julie Crenn, critique d’art

Martine Feipel et Jean Bechameil développent une réflexion autour de l’expérience physique et perceptuelle de l’espace intérieur comme extérieur. Les volumes, l’architecture, le rapport au corps, l’habitat et l’habitant composent leur vocabulaire plastique et conceptuel. L’histoire d’un lieu spécifique donne naissance leurs projets où la perturbation et la modulation de l’espace viennent nourrir un récit aux registres multiples. Un Monde Parfait est un groupe sculptural qui trouve son origine la suite d’un constat. En voiture, le long d’un périphérique, les artistes font le constat de la fin d’un rêve. Ils rencontrent des immeubles de logement vieillissants, dont les murs délités ont noirci et dont les couleurs autrefois éclatantes ont terni. Une pointe d’amertume et de curiosité les empare. Ils entament des recherches sur le bâtiment en question mais aussi sur les répercussions de l’architecture moderne sur les constructions mises en œuvre depuis la Seconde Guerre jusqu’aux années 1970. Ils étudient les plans dessinés la main, partent la rencontre des Grands Ensembles en survivance pour interpeller leur histoire, leur présence et leur devenir. Construits après la Seconde Guerre Mondiale pour reloger la population et apporter le confort de la vie moderne la classe ouvrière, les Grands Ensembles marquent le paysage urbain par leurs imposantes silhouettes. Leurs tours et leurs barres abritent plusieurs centaines de logements, constituant ainsi de véritables cités où la vie collective est mise en avant par leurs concepteurs. Relégués aux abords des grandes villes, ils sont au fil des décennies déconsidérés et abandonnés par les pouvoirs publics. Un désintérêt qui engendre un délabrement des bâtiments accompagné parfois d’un sentiment de rejet de la part de leurs habitants. De nombreux programmes de démolition, de reconstruction ou de réhabilitation sont donc mis en place depuis les années 1990. Martine Feipel et Jean Bechameil travaillent partir de bâtiments survivants dont l’apparence et la vie sont dominées par une précarité. Réel ou imaginé, les artistes s’attachent notamment un moment précis, le temps court durant lequel la barre ou la tour est déshabillée juste avant sa démolition. Privée de ses verres, de son acier et de tous ses apparats, elle est nue et comme suspendue dans le temps. D’une part, le passant peut imaginer qu’elle est en chantier, sur le point d’être habitée ; d’une autre, qu’elle est en fin de vie, ante-disparition. À ce moment précis, l’immeuble dévoile une vulnérabilité et une impuissance que les artistes veulent saisir, eux-mêmes pris par le doute et une forme de nostalgie. Ils retiennent alors cette apparence transitoire pour témoigner de leur attachement l’architecture générée entre les années 1950 et 1970, de l’utopie qu’elle a véhiculé, mais aussi pour poser une série de questions. Le délaissement politique interroge par exemple la légitimité et l’avenir du patrimoine du logement social en France. L’abandon de certaines barres d’immeubles renvoie inévitablement la fin de l’utopie moderniste, la fin d’un monde parfait. Les « Grands Ensembles » leurs apparaissent aujourd’hui inadaptés la vie actuelle rythmée par un individualiste exacerbé, par le besoin d’espace et par l’accession la propriété. L’utopie du vivre ensemble, du partage et de la vie collective semble progressivement s’être évanouie. L’œuvre de Martine Feipel et Jean Bechameil retient leurs silhouettes. Si l’utopie des architectes modernes est effritée, Un Monde Parfait traduit la persistance et la résistance de son essence.

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