DIETER DETZNER (Solo Show) – Project Room : Adrien Vescovi “La dernière pièce”
- Du 28/10/2011 au 03/12/2011
- Localisation : Galerie Gourvennec Ogor
Dieter Detzner
« Les lois de l’intrication quantique » par Marc Bembekoff La connaissance que nous avons de l’Univers n’est que la partie cachée de l’iceberg : son contenu attire l’homme, l’excite, tout comme il peut l’effrayer. Dans un même mouvement, les œuvres de Dieter Detzner repositionnent la place du visiteur, la fois dans l’espace physique du white cube, et plus généralement dans l’Univers. Cet artiste allemand né en 1970 (la même année que le lancement de la mission lunaire américaine Apollo 13), développe une pratique au sein de laquelle il mêle habilement objets minutieusement manufacturés et gestes graphiques l’apparente spontanéité. Il en résulte des œuvres dont la forme rappelle la fois le Minimalisme, les Technological Reliquaries de Paul Thek, les expérimentations cinématographiques de Len Lye… Bref une constellation foisonnante avec laquelle Dieter Detzner aime jouer et laquelle il se confronte travers sa pratique artistique. L’un des éléments récurrents de ses œuvres est la notion de cadre/hors-cadre : ce cadre physique peut être celui de la surface en Plexiglas lustré venant contraindre les formes qu’elle contient (D.N., 2010), tout comme il peut être le cadre du white cube que des éléments invasifs viennent perturber (Pietro, 2009). Dans les deux cas, en mettant scène des éléments semblant se poursuivre vers l’infini, l’artiste produit comme autant de preuves tangibles d’une forme d’indicible se développant au-del du tangible, du monde clos vers l’univers infini pour reprendre le titre de l’ouvrage d’Alexandre Koyré publié en 1957. Dans ce sens, on pourrait presque comprendre le travail de Dieter Detzner comme la métaphore artistique de l’intrication quantique. Ce phénomène physique décrit un ensemble global, sans pouvoir séparer un objet de l’autre, bien que ces derniers puissent être spatialement distincts. Ainsi, même s’ils sont séparés par de grandes distances spatiales, deux éléments ne sont pas nécessairement indépendants et il faut les considérer comme un système absolu et unique. Les œuvres de l’artiste renvoient les unes aux autres, tant par leur forme que par les problématiques qu’elles semblent développer, comme une tentative de capter des éléments épars d’un univers fantasmé. L’espace et les lois de l’apesanteur évoquent 2001 : L’Odyssée de l’espace de Stanley Kubrick et sa séquence culte d’ouverture dans laquelle des singes – hommes primitifs – découvrent avec stupeur un monolithe noir. Ce monolithe renvoie indirectement la série Stehlen, présentée récemment dans le jardin de la galerie Sassa Trülzsch. Ces volumes évoquent une forme de mystique, tout comme les dernières œuvres de John McCracken en aluminium. Mais chez Dieter Detzner, les matériaux employés sont rugueux, pauvres, et juxtaposés une fine bande de miroir qui déjoue l’espace et la perception, tout en faisant ressortir la dimension propre de la matière. On retrouve cette juxtaposition de deux esthétiques différentes dans la série des coffres en Plexiglas recouvrant des formes comme spontanées. Ces traits graphiques viennent ainsi contrebalancer l’aspect poli et lisse du matériau qui le recouvre. On assiste par-l même une sédimentation tant des formes que des discours, l’artiste aimant nommer certaines de ses œuvres par de simples prénoms qui, fortuitement ou non, rappellent certaines icônes de l’art – comme une relecture de l’art par l’art. Le physicien anglo-américain Freeman Dyson résumait un jour la théorie du Big Bang par le fait que « l’Univers savait quelque part que l’homme allait venir. » A l’instar du monolithe du film de Kubrick, les œuvres de Dieter Detzner replacent l’homme dans cet Univers.